MMA ou « Mixed Martial Art ». Paradoxalement, en France, on a choisi de retenir le terme de « free-fight » plutôt que de procéder à une traduction littérale de l’expression anglo-saxonne et de s’en tenir au vocable « arts martiaux mixtes » pour désigner ce sport émergeant et au combien populaire en Europe.
Mais pour quelle raison les compétitions de ce sport émergeant restent interdites en France, alors que les clubs de MMA sont chaque jour plus nombreux ?
Les arguments avancés par les « anti-MMA » paraissent aujourd’hui franchement poussiéreux et déconnectés de la réalité de ce sport.
C’est le Conseil de l’Europe qui en avril 1999 (recommandation n° R. 99-11 du 22 avril 1999) a émis des réserves a l’égard de cette discipline née outre atlantique. Il faut bien reconnaitre qu’au départ on est plus proche du show spectaculaire destiné à un public lassé par le catch que d’une véritable discipline sportive. C’est la raison pour laquelle le Conseil de l’Europe mettait en garde les Etats membres, considérant que ces combats « constituent un danger pour les spectateurs, compromettent la santé des combattants et ont des liens avec des activités illégales […] ».
Or, en une dizaine d’années, le MMA s’est doté d’un corpus de règles transversales empruntées à l’ensemble des disciplines qu’il regroupe. Dès lors, l’emploi de la terminologie « free-fight » est aujourd’hui totalement impropre et n’est d’ailleurs employée que par les détracteurs de la discipline qui n’ont de cesse de vouloir jeter le discrédit sur ce sport émergeant.
D’un point de vue juridique, l’interdiction du MMA repose exclusivement sur le concept de dignité humaine. Ce qui cristallise les passions ce n’est autre que la cage, dans laquelle évoluent les combattants, et les frappes au sol. Bien qu’initialement la cage ait vraisemblablement été conçue pour accentuer le côté spectaculaire, elle s’est avérée à l’usage beaucoup plus protectrice de l’intégrité physique des combattants, évitant les risques de chute lors des projections et le replacement des combattants lors des phases au sol.
Quant aux frappes aux sols, même si elles paraissent très impressionnantes vues de l’extérieur, elles sont en réalité beaucoup moins puissantes qu’en combat debout. Il faut d’ailleurs noter que lors d’une phase au sol tous les coups ne sont pas permis et que les arbitres arrêtent les combats très rapidement pour éviter toute lésion.
A propos de « blessure », l’ensemble des spécialistes s’accordent à dire qu’il n’y pas plus de risques de blessures graves en boxe anglaise, kick-boxing ou rugby, qu’en MMA.
Manifestement, le concept de dignité humaine, également invoqué par le CSA (Recommandation n° 2005-8 du 20 décembre 2005 aux éditeurs de services de télévision concernant la retransmission de certains types de combats – JORF n°7 du 8 janvier 2006, texte n° 26) pour interdire la retransmission des compétitions à la télévision, semble hors de propos et dénué de pertinence. Qu’en est-il de la dignité humaine lorsque certaines chaines diffusent des émissions de télé-réalité où les candidats livrent leur intimité de manière pour le moins dégradante ? Le CSA ne semble pas s’émouvoir pour autant ! Le concept de dignité humaine est manifestement à géométrie variable pour les autorités françaises…
En réalité le MMA souffre d’une conjonction de phénomènes qui pousse l’Etat a maintenir son interdiction. D’une part, l’image la plus répandue est celle du « free-fight » de la fin des années 90 qui, il faut bien le reconnaitre, était trop « barbare » pour être qualifié de sport. D’autre part, il semblerait que les fédérations traditionnelles, et en particulier la fédération de Judo, exerce un pesant lobbying faisant obstacle à la reconnaissance du MMA en France. Que ce soit en créant, au sein même de sa fédération, la discipline de « Mixed Jujitsu Arts », ou en refusant à ses athlètes de concourir lors de compétitions de MMA à l’étranger, les arts martiaux mixtes subissent des attaques injustifiées. Le fond du problème semble plus obscur : le MMA fait de l’ombre aux autres fédérations sportives en proposant de réunir les sports de combat en une seule et même discipline. Que les fédérations sportives se rassurent, les passionnés de boxe anglaise ne passeront pas, du jour au lendemain, au MMA. D’ailleurs, il faudrait plutôt se réjouir de voir de nombreux français venir au MMA pour leur loisir, pour rester en forme, alors qu’il n’aurait jamais franchi la porte d’une salle de boxe ou d’un dojo de judo.
Une réforme doit nécessairement être entreprise sur cette question. Il est juridiquement peu concevable que les entrainements de MMA soit autorisés en France, mais que les compétitions restent interdites, même si force est de constater qu’il existe, dans les faits, un « MMA à la française » qui se déroule sur ring sous l’égide de la fédération de Karaté ( Kempo : « Debout, les frappes sont autorisées sur tout le corps -hors articulations, bas ventre et colonne vertébrale. Néanmoins, les frappes de poing au visage ainsi que les coups de pieds de face au visage sont interdits. Les saisies sont autorisées ainsi que les frappes les accompagnant. Les projections sont également permises. Au sol, le travail est complet en passant par les frappes, les soumissions (clés) et les étranglements. ») ou de la Fédération Française des Sports de Contacts et Disciplines Assimilées, dont fait partie le Pancrace, « jeux de l’olympe Antique et était une des disciplines favorites du public » (sic). Singularité française qui est un non-sens juridique… mais les détracteurs du MMA ne sont plus à une contradiction près.
Ne serait-il pas plus approprié d’autoriser une fois pour toute la pratique du MMA en France, avec bien entendu une véritable fédération qui contrôlera et organisera la discipline ? C’est en tout cas ce qu’attendent de nombreux combattants et professionnels du MMA.
La situation est d’autant plus paradoxale que de nombreux athlètes français représentent l’hexagone dans des compétitions internationales dans une discipline qui reste interdite en France, les privant ainsi de toute couverture médiatique dans ce sport extrêmement populaire, alors qu’ils devraient faire notre fierté et jouir de notre reconnaissance pour leur courage et leur abnégation.